Voici donc la deuxième partie du très long review de David, attention à vos yeux, le mur de texte est bien présent! Le premier article portait 1400 mots, celui-ci monte jusqu’à 2200!
Le problème, c’est que là s’arrêtent les bons côtés. En quelque sorte, si ce titre avait dû être un titre Elder Scrolls normal, il ne s’en serait pas trop mal sorti. Il permet un peu moins d’exploration et un peu moins de « pillage intensif » que les autres titres de la saga (disons, pour illustrer, que cliquer sur une bibliothèque ne permet pas de cliquer sur chaque livre qui s’y trouve mais sur un seul livre qui va s’ouvrir de lui-même). En permettant un mode coopératif de campagne, il aurait probablement trouvé bon nombre de fervents. Le hic, c’est qu’il s’agit d’un MMO et un MMO n’est pas un « coop-mode ». Un MMO doit avoir été créé et pensé comme un MMO et là, le bât blesse.
Que cela soit dit d’entrée de jeu, il est permis de penser que ESO fut conçu comme MMO surtout afin de rentabiliser la chose et de profiter du momentum autour de Skyrim, mais que l’on a pris peur à un échelon ou un autre et que l’on a insisté afin de ne pas trop s’éloigner du modèle qui avait fait les belles heures de la saga.

Si votre conception du MMO est de vous cantonner au PvE – ce que bon nombre appellent plus ou moins avec affection les « carebears » – ESO est définitivement pour vous. À aucun moment vous ne serez forcé d’affronter qui que ce soit. Jamais vous ne croiserez de vagabond d’une autre faction. Jamais votre faction ne sera sous attaque, vous empêchant plus ou moins de réaliser une quête ou d’aller terminer un objectif. Et même après avoir appris qu’il y avait des quêtes PvE dans la zone « contestée » (Cyrodiil, pour les amateurs), vous pourrez la parcourir à loisir en choisissant l’une ou l’autre des nombreuses campagnes à faible population.
Parlons-en de ce système : les campagnes. Tout le PvP et le RvR se résume à la zone nommée Cyrodiil, à laquelle on accède en s’inscrivant à l’une ou l’autre de la dizaine de campagnes actives par serveur. Qu’on se le dise tout de suite : il y a trop de campagnes pour le nombre de joueurs, surtout que l’on peut voir un état des populations par faction de chaque campagne. Sur le serveur nord-américain, cela se traduit par deux campagnes bien pleines, une ou deux intermédiaires et cinq ou six à basse population. Cyrodiil étant un monde gigantesque à instance unique, mais surtout à très faible densité de tout (sérieusement, c’est essentiellement un vaste monde ouvert avec pratiquement aucune ressource), traverser la zone d’ouest en est, à dos de cheval, prend environ vingt minutes temps réel et on les ressent. Cela donne lieu à beaucoup d’action dans environ trois campagnes et du glandage partout ailleurs. Là encore, par contre, on a pas pu s’empêcher de faire plaisir à la population de calinours en plaçant des machins à découvrir (une tribu de trolls par ci, une maison hantée par là, des morts-vivants autour d’une ruine là-bas, un bidule extraplanaire dans une tour), de telle sorte que malgré une limite en population (ce qui fait en sorte que l’on voudrait bien que chaque soldat de son côté fasse son boulot, parce qu’ils comptent!), eh ben on se retrouve quand même avec à peu près un tiers de glandus de chaque côté qui sont bien trop heureux de faire leur petite promenade du dimanche pour trouver des ruines toutes pourries ou le chapelet de la tante de Sheogorath.

Le RvR en lui-même est un autre « tir incertain ». Au début d’une campagne, chaque faction contrôle deux « Elder Scrolls » (bien planqués, puisqu’ils donnent des bonus à chaque joueur) et quelques châteaux, avec leurs dépendances (mine, scierie, ferme), ainsi que quelques postes avancés (outposts). Le joueur qui meurt peut ressusciter dans un château contrôlé par son camp, pourvu que son camp contrôle encore les dépendances autour du château (celles-ci peuvent être capturées) ou que le mur d’enceinte du château est réparé à au moins 50%. Celui-ci doit par ailleurs être rattaché au reste des châteaux de votre faction. Essentiellement, prendre un château adverse trop près de leur centre névralgique peut les embêter mais rend celui-ci difficile à tenir. De la même façon, perdre un château se trouvant derrière vos châteaux de première ligne peut soudainement rendre ceux-ci assez vulnérables. Cela permet des stratégies intéressantes afin de couper les vivres (du moins, le ravitaillement en troupes fraîches). De plus, la faction qui contrôle la totalité des six châteaux autour de la cité impériale (le centre de Cyrodiil, pas une mince affaire) couronnera automatiquement comme empereur son joueur qui aura accumulé le plus de points de « campagne ». Un système pas mal. C’est intéressant pour la faction car tous les joueurs bénéficient alors d’un « bonus d’empereur ». C’est surtout très intéressant pour le joueur qui devient empereur car il débloque alors une branche de compétences d’Empereur. Tant qu’il garde son titre, cela fait de lui un monstre sur le champ de bataille, capable à lui seul de prendre cinq ou six ennemis autrefois de sa force. Lors de la perte de celui-ci, il garde la branche mais les compétences sont réduites au point de ne donner qu’un avantage mineur (disons de 300% plus efficace à 5% plus efficace). L’autre système qui fait le bonheur de la majorité est constitué autour de la prise des châteaux et des armes de siège. Disons-le tout de suite, c’est la partie la mieux foutue de tout le système « MMO ». Les armes de sièges sont plaisantes à utiliser, bien diversifiées et permettent à chaque joueur, même le plus bas niveau, d’y trouver sa place car un trébuchet activé par un niveau 10 est aussi efficace qu’un trébuchet activé par un niveau 50. Entre les balistes, les trébuchets, les catapultes, les béliers et l’huile bouillante, il y a de quoi réjouir tout amateur de combat médiéval. Les châteaux sont ainsi divisés en un grand mur extérieur avec des tours et un bâtiment central colossal. Pour le prendre, les assaillants doivent franchir le premier mur et ensuite trouver une façon d’entrer dans le bâtiment central (défoncer un mur ou une porte), ce qui donne souvent lieu à des contre-attaques de flanc et des batailles épiques dans la cour intérieure. Il faut déplorer, cependant, que le RvR n’a pas de réel objectif final car chaque campagne est remise à zéro aux 90 jours, avec un retour aux positions initiales. À part pour se faire un nom sur le « leaderboard », le RvR manque définitivement de contenu et d’un quelque chose de plus grand, de plus légendaire. D’une façon durable d’entrer dans l’histoire, que ce soit en tant que faction ou en tant que personnage. De la même façon, une guilde peut prendre un château ou une dépendance à son nom, mais cela ne lui rapporte strictement rien. Drôle de concept.

Le point le plus frustrant, cependant, est assurément le PvP et c’est bien dommage car le RvR est assurément plaisant par moments (disons, quand on ne meure pas et qu’on ne doit pas faire dix minutes de cheval pour arriver sur place). Ouvertement, je crois que le beta testing n’a jamais inclus de PvP testing digne de ce nom. On m’a signalé – je ne sais si c’est vrai – que les joueurs étaient limités aux vingt premiers niveaux pendant le beta. Cela expliquerait bien des choses. Disons-le simplement : les compétences n’ont jamais été pensées et équilibrées dans un scénario de joueur contre joueur. Joueur contre monstre? Aucun problème. Y’a de belles idées. Des compétences particulièrement jolies, même. Du beau. C’est au fond un peu ça le problème d’ESO, au final : y’a beaucoup de beau, mais pas tellement de pratique. Un exemple typique? Le camouflage. La majorité des jeux reconnaissent les possibilités absurdes que cela peut amener dans un monde PvP. Le résultat est que s’ils ont une capacité de camouflage, celle-ci ne se limite habituellement qu’au PvE. Même si la capacité n’est pas visible dans les statistiques, il existe une foule de compétences raciales (chez deux races… de la même faction) et apprises (notamment la branche medium armor et le tiers des compétences du Nightblade, l’une des classes) qui viennent augmenter cela. Si bien que l’une des factions est largement peuplée de Nightblades Bosmer/Khajiit qui se baladent carrément invisibles, à moins que quelqu’un lance un sort de détection en spécifique. Vous me direz, et puis alors, une classe d’assassins invisibles, c’est pas la première fois? Non, certes. Mais si vous ajoutez à cela le fait que toutes les classes peuvent cumuler plusieurs compétences avec un effet de « stun » (souvent de 2 à 4 secondes!), qu’elles peuvent être utilisées l’une à la suite de l’autre et que les points de vie sont davantage adaptés à du PvE qu’à du PvP (disons que nous sommes loin des combats interminables à la WoW), la plupart des rencontres PvP que vous risquez de faire sur ESO risquent de ressembler à ceci : vous vous baladez à cheval (parce que vu la taille de la carte, même d’un château à un autre « tout près », on parle de quelques minutes) lorsque soudain, vous ne pouvez plus cliquer sur quoique ce soit et êtes précipité en bas de votre monture (un effet d’animation quand même bien réussi, soulignons-le). Deux vauriens passent ensuite les trois ou quatre prochaines secondes à utiliser quelques-unes de leurs compétences tandis que vous regarderez vos points de vie chuter. Puis, c’est la mort. Si vous êtes chanceux, il se peut que le vaurien soit seul ou que vous soyez plus haut niveau. Vous activerez alors une quelconque capacité de soins… avant d’être immédiatement « stunné » à nouveau, pour autant que le joueur adverse sache appuyer sur 2 et 4. Dire que l’avantage est à celui qui initie le combat est un euphémisme : je n’ai pas perdu un seul combat que j’ai initié, même en un contre un et contre des adversaires de niveau supérieur au mien – le seul point positif d’ESO en matière de PvP est d’ailleurs que la différence de niveaux est beaucoup moins marquée que d’autres MMOs.
Je ne saurais trop insister sur comment le PvP est non seulement de style arcade, mais truffé de compétences farfelues. À part les beaucoup trop nombreux stuns répétés (imaginez la chose quand, dans un combat à vingt contre vingt, un adversaire saute au milieu de votre groupe et fait un AoE stun de TROIS secondes!), une bonne demie douzaine d’autres habiletés sont surpuissantes (OP, dans le jargon :P), mais n’ont surtout pas leur place ou leur équivalent. C’est une juste d’avoir une habileté que tous peuvent calculer comme surpuissante : par exemple, un coup d’épée spectaculaire qui ajouterait 50% de plus à vos dégâts. Il suffirait alors aux créateurs d’en réduire les effets. Mais qu’en est-il d’habiletés uniques qui n’ont pas d’équivalent? J’ai parlé du camouflage plus haut. Toutes les classes peuvent l’utiliser, certes, mais cela revient à dire que tout le monde peut participer à un match de la LNH parce que tout le monde a des jambes et des bras. De la même façon, les sorciers ont une habileté de téléportation. Qui coûte quasiment rien en mana. Qui « stun » en plus les ennemis autour pendant 1,5 secondes (superflu, à moins d’être sorciers, ils ne peuvent pas suivre de toute façon!). Oh et si vous prenez la bonne version « évoluée », cela fait aussi apparaître une boule d’énergie qui absorbe les sorts dirigés contre vous pendant quinze secondes. Les autres classes n’ont aucune capacité semblable. C’est un « get out of PvP » free. Ce n’est qu’un autre exemple. Il y en a plusieurs autres. Le dernier petit souci quant au PvP est probablement l’absence de toute pénalité. Mourir en PvE entraîne, au minimum, une perte de durabilité sur ton équipement (te forçant à le réparer parce que celui-ci perd de son efficacité). Ils ont tellement voulu plaire à leur base pro-PvE cependant que le PvP n’entraîne, quant à lui, aucune pénalité si ce n’est que vos objets perdent de leur valeur. Cela pourrait se tenir, si seulement la « valeur » d’un objet avait la moindre signification. Or, comme toutes les pièces d’équipement peuvent être déconstruites (pour améliorer vos compétences de crafting ou obtenir des morceaux de crafting plus utiles), personne ne songerait à les revendre à un marchand PNJ de toute façon. Cela donne lieu à des scènes hautement humoristiques où des groupes, sachant qu’ils peuvent « réapparaître » (respawn) au château actuellement sous attaque par une force plus nombreuse que la leur, peuvent aller se suicider à loisir sur celle-ci, tant et aussi longtemps qu’ils en amènent quelques-uns avec eux. Ceux-ci devront alors réapparaître au château le plus près (soit loin) et se taper tout le trajet à nouveau. J’ai vu des gens se balancer en bas des murailles et faire des attaques suicide que pour ennuyer des ennemis bas niveau ou attaquer d’autres qui s’activaient sur des engins de siège. Bref, du grand n’importe quoi insensé.
La semaine prochaine, dernière partie du review et la note finale donnée par David, j’espère que vous appréciés sa plume et ses idées!